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Comment comprendre la violence dans la Bible Accueil | Nous contacter

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Comment comprendre la violence dans l’Ancien et le Nouveau Testaments?

Par Jean Dib

En analysant l’Ancien testament, les lecteurs vont lire des histoires de guerres et des récits de batailles; on en trouve plein dans la Bible. Certains lecteurs vont parler d’un peuple violent qui a fait des massacres au nom de Dieu. Puisque Dieu est ‘avec nous’, nous avons le droit d’agir comme nous le désirons. Ceci n’est pas nouveau dans l’histoire de l’humanité. Il y en a des lecteurs qui vont attribuer cette violence à Dieu même.

Avant d’analyser ce sujet, je tiens à remercier le prêtre Roger Martineau pour ses commentaires constructifs. Dans ce document, je vais essayer de décrire c’est quoi la violence? Je ne suis pas un anthropologue, ni un philosophe ni un exégète. Il y en a plein d’articles sur ce sujet. Ces articles vont traiter  pourquoi nous trouvons de la violence dans la religion et spécifiquement dans la Bible; d’autres vont parler de Freud et des philosophes pour trouver l’origine de la violence; La violence fait partie de notre histoire et ce n’est pas une philosophie. Il y en a qui vont voir la violence dans chaque situation, même dans l’amour. Ils vont raisonner en disant que si on aime quelqu’un, on envahit la personne qu’on aime, donc on commet une violence contre cette personne. Ces ‘philosophes’ oublient souvent une donnée fondamentale : « l’homme est libre et c’est lui qui agit ». Quand nous sommes face à des actes violents, certaines personnes vont blâmer un être suprême ou des fois des êtres malins plus forts que nous. Nous vivons dans une société et nous ne sommes pas isolés. Nous sommes influencés par ce qui nous entoure et nous analysons d’après nos yeux, notre passé et notre présent. Il ne faut pas non plus regarder notre histoire et notre Dieu sans se questionner. Certains critiques du christianisme vont nous comparer à une femme violentée qui ne voit plus sa propre personne et qui dit que son agresseur l’aime et c’est pour cela qu’il a agit ainsi.

Afin de pouvoir comprendre le message de Dieu et comment Il s’est révélé à nous, essayons de comprendre c’est quoi la violence. Dans ce document, nous ne parlons pas des attributs de Dieu. Nous essayons toujours de comprendre Dieu, cet être infini, avec nos yeux d’hommes. Dieu s’est révélé à nous à travers les prophètes et ensuite il s’st incarné pour venir parmi nous, pour nous parler face à face. C’est ça le christianisme. Dieu s’est révélé petit à petit. Nous l’apercevons d’une façon énigmatique quand il demande à Abraham de sacrifier son fils. Certains critiques voient en Dieu, une figure féroce qui réclame sans cesse des sacrifices. La violence est contre la nature même de Dieu. Une violence divine n’existe pas. La violence humaine accuse et punit, Dieu est le bon juge qui nous purifie pour nous emmener à notre vrai nature. Ça serait illusoire d’éliminer cette violence sans l’aide de Dieu qui nous promet son éradication après le retour du Christ.

N’essayons pas de se cacher et nier l’existence de notre histoire violente dans nos livres sacrés. Cette violence est dans les hommes pour ‘justifier’ les actions prises. C’est bien cette violence-là qui fait le plus problème pour nous. Certains lecteurs vont attribuer cette violence à Dieu lui-même qui a un comportement brutal; Ceci est déroutant pour notre foi! La violence est réelle et elle existe dans tous les humains, aussi bien dans le Nouveau que l’Ancien Testament.

Ceci, nous surprend de l’image que nous nous faisons du Nouveau Testament. Est-ce que Dieu a changé; est-Il le même Dieu? La Bible est un ensemble et nous ne pouvons pas enlever des parties ou dire tout simplement, on est dans le Nouveau Testament où seulement l’Amour qui règne. Dieu est Amour dans les deux testaments. Les humains justifient leur violence en disant que c’est Dieu qui leur ordonne à être ainsi.

C’est quoi la violence :

‘Il y a violence seulement là où l’on crée et où l’on maintient le droit, alors qu’il n’y a pas de violence là où le droit est absent.’ Tout est relatif. Une personne qui enferme quelqu’un dans une chambre, commet de la violence, alors que si l’état emprisonne un citoyen après un jugement, ceci n’est pas de la violence; pourtant le fait est le même, une personne est empêché de se mouvoir selon sa volonté. Si nous revenons au temps du Christ, l’esclavage n’était pas considéré de la violence, même pas un crime. Lincoln a aboli l’esclavage aux États-Unis.  Aujourd’hui, en 2010, l’esclavage est un crime contre l’humanité. Les croisades ‘1095-1291’ n’étaient pas considérées comme de la violence. Alors qu’aujourd’hui, ce genre de guerre est contre nos normes chrétiennes. La violence n’est pas éradiquée. Elle est justifiée par l’État, le gouvernement, l’auto-défense…

Il y a dans l‘humain une tendance à la violence. Cette violence n’est pas toujours liée nécessairement à l’histoire ni à la misère sociale. C’est le résultat du péché et de notre libre choix. La violence surgit quand nous refusons notre humanité. La violence n’est pas toujours une réaction à des éléments extérieurs mais un déni de notre humanité.

La violence est une façon de dire « non » à la vraie vie. C’est le désir de devenir un tout-puissant. Il y a là un pêché d’orgueil. L’homme n’a pas toujours découvert cette joie que notre humanité donne; l’être humain refuse ce bonheur en se laissant fasciner par le rêve d’être « comme un dieu ». L’homme croit au dieu qu’il voudrait être. Il veut que rien ne le limite, même le libre choix de jouer avec la vie des autres humains. L’humanité a façonné une image de Dieu selon sa perception. Au temps de l’exode, la violence était partout. Les tribus et les nomades luttaient pour la domination des uns sur les autres. Ils se façonnaient des dieux forts pour les aider dans leur lutte. Il fallait que leur dieu soit le plus fort pour les aider à combattre les ennemis. Il n’y avait pas des journalistes ni des historiens. Leur histoire se racontait de père en fils et d’un village à un autre. Surtout pour les peuples sémites, l’histoire se racontait avec des images exagérées afin de mieux passer le message. Voulant toujours avoir les dieux les plus forts, ces tribus justifiaient leur violence en se vantant que c’est leur dieu le plus fort qui les a conduit à la gloire. Les livres de l’ancien testament racontent la tradition orale, des siècles après l’exode. Quand on lit ces livres sacrés, nous devons saisir le message de cette histoire, tout en tenant compte du langage dans laquelle elle était écrite et aussi tenir compte de l’environnement socio-économique. Si nous ne saisissons pas le message, nous allons nous attarder sur l’histoire violente.

Ancien et Nouveau Testament

Dans le récit du passage de la mer Rouge, nous voyons, au petit matin, les cadavres des Égyptiens étendus sur le rivage (Ex 14,30).

Même dans les psaumes, qui sont des louanges, nous chantons des appels à la vengeance contre les ennemis d’Israël  (Ps 137,8-9). Le peuple d’Israël appelait son Dieu fort pour venir se battre pour lui et pour justifier leur propre violence.

Cette histoire de violence n’est pas juste limitée à l’Ancien Testament mais on la rencontre, dans le Nouveau Testament. Voir l’attitude de Jésus contre les Pharisiens (Mt 23,13-39), l’épisode d’Ananie et Saphire en Ac 5,1-11, le décret d’excommunication proféré par Paul à l’encontre d’un membre de l’Église de Corinthe en 1 Co 5, ou les nombreux passages sanglants de l’Apocalypse.

Nous sommes choqués de voir ces textes et nous voulons souvent les cacher, car notre religion est une religion d’Amour et nous ne voulons pas montrer des écritures sacrées qui risqueraient d’alimenter la violence dont les hommes se montrent capables.

Il ne faut pas oublier le rôle de Satan, qui fait passer à Dieu des sentiments et d’attitudes  indignes de Lui.  « Ne dis pas : “c’est le Seigneur qui m’a fait pécher” car il ne fait pas ce qu’il a en horreur » (Si 15,11).

Comment comprendre Dieu qui est compromis dans la violence?

La Bible ne s’embarrasse pas de nos scrupules et de nos jugements d’homme, elle écrit l’histoire d’un peuple, comme elle a été racontée. Certains lecteurs vont attribuer à Dieu des images particulièrement violentes. Ceci est contre l’essence même de Dieu. L’homme a toujours voulu justifier sa violence.

Il y en a trop d’atrocités, mises sur le compte de  Dieu. Il combat et ordonne aux armées d’Israël de jeter l’anathème sur des villes entières (Dt 20,16) et laisse ses prophètes égorger leurs concurrents (1 R 18,40) ? Il a même envoyé les flots du déluge pour noyer la quasi-totalité de l’humanité (Gn 6,7).  Tous les déluges qui ont frappé l’humanité, furent attribués à Dieu. C’est une punition.

La plus grande cruauté, est que la violence frappe toujours aussi, de manière massive, les femmes et les enfants : des enfants sont l’objet d’actes guerriers, ils sont brisés contre un rocher (Ps 137,7; 2 R 6,28;4,10; Lev 26,27-33); ils sont sacrifiés (Gn 22), notamment à Moloch (2 R 17,17.31;21,6;23,10), ou découpés en morceaux (1 R 3).

À longueur de pages, la Bible va nous décrire cette violence comme une colère divine qui s’abat, telle une sanction du péché, sur le peuple (Oséa 5,10; Is 9,11; Ez 5,13) mais aussi sur les nations orgueilleuses (Is 10,5-15) et qui ne manquera pas de semer la terreur au jour du jugement, « jour de colère » (Amos 5,18-27). C’est juste une image que l’homme a fait de son Dieu fort. Les écrivains vont faire appel à Dieu pour se venger pour eux. C’est comme un enfant qui est en chicane avec un autre, va demander de l’aide à ses parents pour l’aider dans son conflit contre son voisin. La vengeance fait partie de ces tribus et c’est normal que l’on la trouve décrite dans leurs livres sacrés. Dieu s’est révélé à nous dans ce milieu violent, et l’homme ne fut pas capable au départ de dissocier ses désirs de celle de Dieu.

Cette violence nous choque; nous aussi, des fois, allons la mettre sur le dos de Dieu et nous rejetons le dieu méchant et vengeur de l’Ancien Testament pour lui opposer le Dieu, plein de bonté, révélé par le Nouveau Testament. Cette présentation est trop simpliste. La Bible est complexe et Dieu est Unique. Il ne faut pas rejeter l’Ancien Testament; Essayons de découvrir notre Dieu qui se révèle à travers les deux Testaments.

Cette violence justifiée par ‘la colère de Dieu’ n’est pas réservée à l’Ancien Testament mais elle est retrouvée dans le nouveau testament : le feu et la géhenne (Mt 3,12;13,42;22,7;25,41), le sang et les supplices (Mt 18,34; Luc 12,47;19,27) ainsi que les pleurs et les grincements de dents (Mt 13,42;22,13). La colère divine (Marc 3,5) semble atteindre jusqu’aux végétaux (la malédiction du figuier en Marc 11,21). Nous constatons aussi la colère de Jésus dans le Temple (Jean 2,23).

L’image de Dieu violent dans l’Ancien Testament est-elle celle que Jésus nous reflète?

Les images violentes attribuées à Dieu dans le premier testament se retrouvent dans le second. Ces images sont des justifications de nos actes. Si nous comprenons Dieu, nous verrons que c’est le même Dieu qui dans toute la Bible veut sauver les hommes de leur violence et d’autre part c’est le même Dieu qui se dévoile à nous. En lisant les deux sections de notre Bible, saisissons le vrai message de Dieu, et dissocions ces images qui viennent de nous et non de sa vrai Parole.

1°) C’est le même Dieu qui dans toute la Bible veut sauver les hommes de leur violence

La Bible nous annonce qu’un des problèmes majeurs que Dieu veut adresser est celui de la violence humaine. Tout le récit biblique est encadré par deux fresques d’un monde sans violence. C’est tout d’abord, aux premières pages de la Bible, la création est un projet de douceur, à l’image du Créateur. À l’autre bout de la Bible, le livre de l’Apocalypse offre la vision d’un monde réconcilié par la victoire de l’Agneau sur les puissances de mal et de mort, un monde définitivement débarrassé de la violence, sans plus de cris, de peines ni de larmes (Ap 21).

Sur cette image de douceur, se déroule l’histoire biblique, la révélation d’un Dieu « lent à la colère » (Ex 34,6; Is 48,9; Ps 103,8) qui ne se résout jamais à laisser la violence des hommes pervertir totalement sa création et mettre en péril jusqu’à leur propre existence. Son  projet est de « détruire la guerre jusqu’au bout du monde » (Ps 45,10; Oséa 2,20; Ez 34,25; Is 11,6-9). Il ignore la vengeance, faisant lever son soleil sur les bons comme sur les méchants (Mt 5,45).

 « Le Dieu unique est celui qui reproche aux hommes leur violence et s’apitoie sur leurs victimes, celui qui substitue aux sacrifices des premiers-nés l’immolation des animaux et plus tard critique même les sacrifices animaux » René GIRARD (un philosophe français. Il se définit lui-même comme un anthropologue de la violence et du religieux.)

Dans l’image de l’histoire de Job, nous voyons un Dieu qui aime et qui défend les innocents; et nous affirmons avec Job : “Je sais, moi, que mon Défenseur est vivant.” (Job 19,25). 

2°) C’est le même Dieu qui se révèle dans toute la Bible.

L’Église catholique, à propos des livres de l’Ancien Testament, déclare ceci :

« Bien qu’ils contiennent de l’imparfait et du caduc, ils sont pourtant les témoins d’une véritable pédagogie divine. C’est pourquoi les chrétiens doivent les accepter avec vénération : en eux s’exprime un vif sens de Dieu; en eux se trouvent de sublimes enseignements sur Dieu, une bienfaisante sagesse sur la vie humaine, d’admirables trésors de prières; en eux enfin se tient caché le mystère de notre salut. Inspirateur et auteur des livres de l’un et l’autre Testament, Dieu les a en effet sagement disposés de telle sorte que le Nouveau soit caché dans l’Ancien et que, dans le Nouveau, l’Ancien soit dévoilé. Car, encore que le Christ ait fondé dans son sang la nouvelle Alliance ( Luc 22,20; 1 Co 11,25), néanmoins les livres de l’Ancien Testament, intégralement repris dans le message évangélique, atteignent et montrent leur complète signification dans le Nouveau Testament ( Mt 5,17; Luc 24,27; Rm 16,25-26; 2 Co 3,14-16), auquel ils apportent en retour lumière et explication. » Concile Vatican II, Constitution Dei Verbum §§ 15 et 16

 Dieu cherche à dégager les hommes de leur violence et, du coup, à modifier l’image qu’ils se font de Lui. C’est ainsi que, dès le livre de la Genèse, Dieu prend une série de mesures pour limiter les effets d’une violence devenue inévitable (Gn 6,11,13).

« Tout d’abord il modifie le régime alimentaire des humains et leur donne les animaux à manger. Il fait ainsi une concession à la violence (Gn 9,1-3). Mais l’espace ainsi ouvert à la violence est aussitôt limité par deux instructions visant à l’endiguer, à l’empêcher de proliférer. C’est d’abord l’interdit du sang qui rappelle le principe immuable du respect de la vie (Gn 9,4). Ensuite, la loi du talion (« qui verse le sang de l’humain, par l’humain son sang sera versé ») pose le principe de proportionnalité entre faute et châtiment, limitant ainsi l’étendue de la vengeance. Mais cette loi avertit aussi le violent que sa violence pourrait bien lui revenir et le détruire à son tour (Gn 9,6a). De plus, entre ces deux paroles visant à réguler l’usage de la violence pour laisser ses chances à la vie, Dieu lui-même se déclare garant des droits des victimes de la violence (Gn 9,5). Enfin, il rappelle que ces concessions qu’il a faites ne suppriment pas la vocation de l’humain créé à l’image de Dieu et destiné à la vie (Gn 9,6b-7). » André WENIN (Il est né en 1953, est docteur en sciences bibliques (Institut biblique de Rome). Il enseigne l'exégèse de l'Ancien Testament et les langues bibliques à la faculté de théologie de l'Université catholique de Louvain-la-Neuve)

Les nombreux appels à la vengeance contenus dans les psaumes sont une étape ultérieure : on parle d’autant plus de vengeance, qu’on s’interdit d’y avoir recours soi-même : Nous appelons notre Dieu, notre Dieu fort  pour se venger pour nous (Dt 32,35).  Pourtant, nous trouvons dans l’Ancien Testament : "Tu n’auras pas dans ton cœur de haine pour ton frère… Tu ne te vengeras pas et tu ne garderas pas de rancune envers les enfants de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même." (Lév 19,17).

 Jésus nous a  montré qui est mon prochain (Luc 10,29-37) : c’est même mon ennemi!

Dès l’Ancien Testament, la progressive révélation de Dieu avait conduit Israël à entrevoir que le châtiment et la vengeance ne sont pas à mettre au compte de Dieu : Certains textes nous montrent qu’au fond Dieu n’est jamais totalement déterminé à punir (d’où le surprenant marchandage d’Abraham en faveur de Sodome (Gn 18,22-32). L’humain trouve des « punitions » de Dieu dans tout ce qui en dehors de son contrôle.

Dieu, même lorsque son amour est bafoué et méprisé, ne se venge pas… précisément parce qu’Il ne ressemble pas aux hommes : "Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère… car je suis Dieu, moi, et non pas homme" (Osée 11,9).

Jésus ne dira pas autre chose lorsqu’il nous dira d’aimer nos ennemis "afin d’être vraiment les fils de notre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes." (Mt 5,45).

3°) Le but ultime de Dieu

Dieu, dans son dessein de salut universel, veut sauver les méchants eux-mêmes de leur violence: « sur la croix, il a tué la haine » (Ép. 2,16; cf. 1 P 2,22-24).

« Car, en voyant mourir l’innocent, chacun peut ouvrir les yeux sur le fruit de sa propre violence. Il peut alors s’en détourner, choisir d’y renoncer pour entrer dans une autre façon de vivre. C’est bien ainsi que Jésus triomphe de la mort : en y descendant de manière à faire signe au violent pour l’inviter à guérir de sa violence. » André WENIN

Avec l’incarnation de Dieu, nous commençons à comprendre mieux son message; nous avons une perception différente de Dieu. L’image que nous faisions de Dieu a changé. Dieu ‘violent’ est ainsi devenu le Dieu violenté, crucifié, le temps de la miséricorde qui succède à celui de la colère (Rm 5,9;9,22-23; 1 Th 1,10;5,9). Pourtant Dieu n’a pas changé mais il a un plan : C’est celui de vaincre la violence qui vient de l’homme et de son libre choix.

Comment percevoir notre Dieu de la Bible

Nous ne devons pas tomber dans le piège de nier l’Ancien Testament comme étant dépassé, un vestige d’une étape archaïque. Comment comprendre ces textes déroutants?

L’ancien Testament est l’histoire du peuple de Dieu. Le livre des lois est nécessaire afin de donner des lois à ce ‘peuple’ ou tribu, qui vivait dans un milieu violent. Dieu nous guide et se révèle à nous par ses paroles adressées aux prophètes. Il prend des actions à notre place au départ, pour nous emmener petit à petit à Lui, pour nous révéler sa personne divine. Il nous parle face à face en s’incarnat et en devenant homme. Il nous montre toute la violence que l’humain est capable de faire et Il nous emmène à haïr cette violence et à considérer notre ennemi comme un frère. Malheureusement cette violence n’aura pas de fin qu’à son retour à la fin des temps.

Le rôle de Dieu dans l’histoire de son peuple.

Loin d’être un spectateur indifférent de la violence des hommes qu’il a créés, le Dieu de la Bible en souffre et réagit à leur péché et leur inhumanité révoltante.

« Tu m’as séduit, Seigneur, et je me suis laissé séduire; tu m’as maîtrisé : tu as été le plus fort » (…) Ta Parole est en moi « comme un feu dévorant, enfermé dans mes os, que je m’épuise à contenir »  … Ainsi s’exprime le prophète Jérémie, parlant de Dieu. Dieu aime l’homme à la folie (1 Co 1,18-29; Mc 3,21) et cette passion est communicative ! (1 Co 3,18; 1 Co 4,10; Ac 26,24). Pour sauver l’homme, en effet, Dieu emploie les grands moyens et attend la même chose en retour (Mt 5,13). L’absolu de Dieu ne souffre pas de demi-mesure. (Ap 3,16).

 Dieu s’est engagé auprès des opprimés. Venu pour apporter non la paix trompeuse que dénonçaient déjà les prophètes ( Jr 6,14), mais le glaive (Mt 10,34; Luc 12,51), Jésus jette la dissension jusque dans l’institution la plus sacrée, la famille, divisant parents et enfants, frères et sœurs, en raison de l’appel qu’il lance (Mt 10,35) (Luc 23,2). 

St Paul, utilisera souvent l’image du combat pour évoquer l’existence chrétienne faisant écho à l’enseignement de Jésus lui-même.

La Bible est un long récit d’un long combat contre les idoles et contre le péché : « Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre lutte contre le péché » (He 12,4) Il s’agit d’un combat à la vie et à la mort. Les martyrs, avec leur vie, vont témoigner de cette lutte contre le mal.

La bonté de Dieu ne fait pas disparaître sa justice : « N’essaie pas de le corrompre par des présents, il les refuse, ne t’appuie pas sur un sacrifice injuste. Car le Seigneur est un juge qui ne fait pas acception des personnes. » (Si 35,11-12).

La tendresse immense de Dieu laisse en effet les hommes responsables de leurs actes : « Ne sois pas si assuré du pardon que tu entasses péché sur péché. Ne dis pas : “Sa miséricorde est grande, il me pardonnera la multitude de mes péchés !” car il y a chez lui pitié et colère et son courroux s’abat sur les pécheurs. » (Si 5,5-6). Aimer quelqu’un ne veut pas dire rien faire. C’est prendre ses responsabilités. La bonté de Dieu et son Amour le poussent à agir. Il ne restera pas insensible quand nous tombons dans le pêché. C’est les humains qui ont attribué à Dieu des ‘attitudes humaines’ comme : vengeance, colère, punition, massacre, feux dévorants.

 « Ne dis pas : “C’est le Seigneur qui m’a fait pécher” car il ne fait pas ce qu’il a en horreur. Ne dis pas : “C’est lui qui m’a égaré”, car il n’a que faire d’un pécheur (…) Si tu le veux, tu garderas les commandements : rester fidèle est en ton pouvoir. » (Si 15,11-20).

Pour la Bible, tout n’est pas tolérable et Dieu lui-même est saisi de saintes colères !

Le chrétien sait qu’il ne doit pas agir n’importe comment, que son agir n’est pas un jeu que Dieu le laisserait jouer sans le prendre au sérieux et sans responsabilité. Il sait qu’il devra répondre de ce qui lui a été confié, comme un intendant (Mt 25,14-30; Luc 12,40-48).

Au jour du jugement, il sera trop tard pour choisir qui nous voulons suivre, comment nous voulons vivre. Notre vie sera notre témoin. Ce jour-là, les pécheurs constateront alors qu’« un grand fossé » aura fini par se creuser entre eux et Dieu. Les évangiles prennent les images juives pour évoquer cet éloignement de Dieu : « les ténèbres extérieures » (Mt 8,12;22,13), « les pleurs et les grincements de dents dans la fournaise ardente » (Mt 13,42), « la géhenne où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas » (Mc 9,48)

Chacun de nous mène sa vie comme il l’entend et donne, ou non, une dimension d’éternité à sa vie. L’enfer ou le paradis, chacun de nous se le prépare et peut en avoir dès maintenant un avant-goût ! Notre vie apparaît ainsi comme une affaire grave et c’est de là précisément que vient sa dignité. Devant un tel enjeu, Dieu m’est pas indifférent et Il réagit fortement pour notre bien.

4°) Dieu vient à notre secours

Lorsque nous sommes choqués de trouver dans la Bible - et notamment dans le Nouveau Testament - des textes qui évoquent la violence, nous réagissons en fonction d’une certaine image que les humains font de Dieu et de Jésus-Christ. Nous projetons sur Jésus : la tolérance, la tendresse, le respect, la justice et la patience.

En lisant La Bible, nous nous faisons des images de Dieu et de Jésus et nous croyons connaitre Dieu.

« Quand donc nous croyons savoir qui est Dieu, écrit André WENIN, le Dieu ‘violent’ de la Bible vient à notre secours. Ce Dieu ‘violent’ nous tend la main. Il nous interroge, nous invitant ainsi à sortir de l’idolâtrie qui consiste à faire Dieu à notre image. Stimulés de la sorte, nous découvrirons, avec plus d’acuité, que, si Dieu est amour et cet amour est douceur, il ne l’est pas au prix d’une démission face au mal et aux forces de mort. Car il ne cesse de les combattre. » 

Conclusion :

Si la Bible contient tellement de textes violents, c'est que la violence fait partie de notre vie et qu'on est appelé à la gérer. Bien sûr, nous sommes opposé à la violence, mais il faut aussi se demander pourquoi la violence naît et pourquoi.

L’histoire de l’humanité est pleine de violence. La Bible reflète notre histoire et surtout l’histoire du peuple d’Israël. L’histoire de ce peuple a commencé dans un environnement très violent. Dieu nous a parlé à travers les prophètes qui sont des liens entre l’humain et Dieu. Dieu a parlé avec le langage des humains de l’époque. Dieu est vivant et sa parole est vivante. Il va nous parler dans notre langage contemporain et Il va agir avec des manières compréhensibles à nous. On ne lit pas la Bible de la même manière à toutes les époques et dans toutes les régions du monde. Certains psaumes de vengeance nous paraissent choquants ? C'est pourtant le seul moyen de crier du peuple d’Israël vers son Dieu, puisqu'il n'avait, à ce moment, aucun moyen de se révolter.

Le livre de l’Exode rapporte une scène extraordinaire au cours de laquelle Dieu apparaît spécifiquement à Moïse pour lui faire connaître qui il est véritablement (Ex 34,5-7). C'est la clé de la théologie de l’Ancien Testament, où sont énoncés quels sont les traits fondamentaux de Dieu : il est bon, compatissant, miséricordieux, bienveillant et fidèle. Il a donné les lois à Moïse. Une société ne peut pas exister sans règles. Dieu est intervenu directement dans la vie de son peuple pour gérer sa vie. Ceci ressemble aux actions d’une mère qui va dicter à ses enfants les règles à suivre et qui va les protéger contre tout mal extérieur. Nous voyons dans ce texte l’amour du divin envers son peuple et sa jalousie pour le garder contre tout mal. Quand l’humain et la société ont évolué, Dieu intervenait moins directement, et son peuple est appelé à faire des choix qui ne sont pas toujours les meilleurs. Dieu va entendre les demandes de son peuple et va le guider avec la voix des prophètes. Les humains sont toujours libres et la violence vient de l’homme. Dans les psaumes, on va demander à Dieu de venger son peuple, de détruire ses ennemis, comme un enfant qui demande à son père de le défendre contre ses malfaiteurs.

Certaines règles sont là à cause de la dureté de notre cœur. Jésus la fait rappeler à ses interlocuteurs quand on lui a posé la question sur le divorce. C’est avec l’avènement de Jésus, que nous avons mieux compris le message de Dieu et qu’est ce qu’il attend de nous. Dieu n’a pas changé mais nous comprenons mieux son message et nous saisissons que tous les humains sont nos frères et que nous devons prier pour nos ennemis plutôt que de demander à Dieu de se venger pour nous.  L’image de la violence de l’Ancien Testament ne fait que répondre à celle des hommes. Le Dieu du Nouveau Testament passe, lui, de l’exercice de la justice à l’annonce du salut éternel.

Ne tombons pas dans le piège d’un cliché : le Dieu du Nouveau Testament est, bien entendu, un Dieu d’amour, mais celui de l’Ancien, un Dieu ‘violent et répressif’, dont la caractéristique principale est la colère. Dieu est le même et n’as pas changé.

Les auteurs de l’Ancien Testament présentent d’emblée Dieu comme un Dieu qui est source de vie et soucieux d’en favoriser le plein épanouissement. Il est celui qui crée le cadre dans lequel se déroule l’existence humaine et prend soin de nous protéger des forces du chaos. Dieu nous accorde trois valeurs fondamentales : celle de la non-violence, du respect de la vie et de la liberté de l’homme. Il veut notre bonheur dans un milieu où l’Amour règne. Il nous a prédestinés au paradis avec Lui. Nous le voyons au début de la Bible et à la fin après le retour du Christ.

Dieu a toujours voulu éliminer la violence de l’homme. L’homme fut encadré par des lois, afin que la violence ne conduise pas la société à s’autodétruire. La ‘colère’ de Dieu participe à ces mesures coercitives. Par la menace qu’elle fait peser, elle garantit le respect des lois et de l’ordre social. Elle libère aussi l’homme des formes les plus exacerbées de la violence. Les actions de Dieu sont à cause de son souci de garantir la possibilité d’une vie en plénitude. Dieu s’emploie à combattre le mal jusqu’à son éradication. La Bible ouvre nos yeux sur le combat que Dieu mène dans le monde contre ce qui corrompt l’homme. Il n’y a pas en Dieu de force brutale visant la destruction. Dieu n’est pas l’initiateur de la violence. Une fois la violence posée, il l’utilise dans le sens de l’apaisement et de son éradication. L’action de Dieu est toujours au service de la vie. L’amour de Dieu pour l’homme est infini : Dieu est Amour. Il appelle l’homme à la communion avec Lui et à entrer avec Lui dans la lutte contre le mal qui détruit l’homme en refusant la violence brutale et destructrice, en refusant de magnifier la violence. La violence, vient de l’homme et non de Dieu. Dieu réagit contre la violence ; Ceci est la conséquence de la sainteté et de l’Amour de Dieu pour les hommes. Dieu a gagné ce combat avec son fils Jésus sur la croix. L’éradication de la violence et de tout mal va se faire après le combat final et le retour du Christ sur la terre.

L’image de la violence dans la Bible est liée au problème de la justice et du droit dans un monde où le mal est présent. Dieu a toujours combattu  l’injustice, la méchanceté, tout ce qui nous éloigne de Lui. Dieu lutte contre le péché. Ce n’est pas le caractère de Dieu qui est violent, c’est le monde des hommes.

L’opposition que l’on ressent  entre le Dieu de l’Ancien Testament et le Dieu du Nouveau résulte, en réalité, uniquement d’une différence de perspective. Le premier Testament nous décrit une société violente qui a pris Dieu comme chef.  Pour le peuple de l’Exode, Dieu est devenu en charge de leur État, Israël; Son rôle est exercé bien sûr à travers ses prophètes. Ils Lui ont attribué des rôles pour exercer ses fonctions: la garantie de l’unité nationale, la défense du territoire et l’exercice de la justice. Le Dieu du Nouveau Testament, quant à lui, se situe par rapport à une communauté de croyants qui Le connaissent.

Dieu est toujours le même et n’a pas changé à travers les siècles. La violence vient du libre choix de l’homme. Nous ne pouvons pas parler de ‘violence divine’. Car ceci est contre sa nature. L’homme a montré à travers l’histoire sa violence dès le début avec l’action de Caïn contre Abel. Cette violence continue jusqu’à nos jours avec toutes ces guerres que l’humain crée contre ses frères. Elle n’est pas limitée à la période de l’histoire de l’ancien testament. Comme Jean-Paul a dit, nous avons une culture de la mort. Mais nous avons l’Espoir que Jésus nous donne. Nous avons l’exemple de nos saints pour nous guider sur le bon chemin. La Bible n’est pas un livre écrit par Dieu mais par des hommes inspirés. Les auteurs furent choisis par Dieu afin de se révéler à nous.

Donnons à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu.

Bibliographie

  • BEAUCHAMP (Paul) et VASSE (Denis) .- La violence dans la Bible .- Paris, Cerf, 1991, « Cahier Évangile» n°76

  • BEAUCHAMP (Paul) .- « La violence dans la Bible » dans Études 390-4 (avril 1999), pp.483-496

  • DOMERGUE (Marcel) .- « La violence et la Bible » dans Croire aujourd’hui n°65 (15 février 1999), pp.23-26

  •  GIRARD (René) - Des choses cachées depuis la fondation du monde.- Paris, Grasset, 1978.

  • GIRARD (René) - Je vois Satan tomber comme l’éclair.- Paris, Grasset, 1999.

  • LEON-DUFOUR (Xavier) .- articles « Violence » et « Colère » dans le Vocabulaire de Théologie Biblique, Paris, Cerf, 1971.

  • OEMING (Manfred) - « Dieu et la violence dans l’Ancien Testament : observations à contre temps d’un exégète » dans Dieu est-il violent ? La violence dans les représentations de Dieu.- ouvrage collectif, Presses Universitaires de Strasbourg, 2005, pp.11-30

  • de PURY (Albert) - « Dieu puissant, Dieu violent ? Violence, justice et paix dans l’Ancien Testament », conférence prononcée en avril 1999 à Paris et reproduite dans le n°52 (juin 1999) du bulletin d’information biblique publié conjointement par le « Service Biblique Catholique Évangile et Vie » (8, rue Jean Bart 75006 Paris) et les « Équipes d’Animation et de Recherche Bibliques » (47, rue de Clichy 75009 Paris), pp.15-20.

  • TRUBLET (Jacques) .- « Les effets pervers de l’Exode » dans Lumière et Vie n°226 (La violence et Dieu. Rigueur et pardon) - Lyon, 1996, pp.19-41.

  • WENIN (André) - « Violence et vérité de la Bible », conférence prononcée en avril 1999 à Paris et reproduite dans le n°52 (juin 1999) du bulletin d’information biblique publié conjointement par le « Service Biblique Catholique Évangile et Vie » (8, rue Jean Bart 75006 Paris) et les « Équipes d’Animation et de Recherche Bibliques » (47, rue de Clichy 75009 Paris), pp.3-14.


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Modifié le  14-02-2012.